Inflation et évolution des salaires : un contexte assez inédit

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La France connait aujourd’hui une situation d’inflation inédite qui s’est accélérée à la faveur de la guerre en Ukraine. Ainsi, sur un an (douze mois glissants), les prix à la consommation ont cru de +4,5% en mars, après +3,6% en février et +2,9% en janvier : des niveaux records depuis 1985 (cf. tableau 1) !

Tableau 1 : évolutions de l’indice des prix à la consommation

  

Une poussée inflationniste appelée à se propager ?

Cette hausse des prix est particulièrement vive dans deux secteurs (tableau 2) : l’énergie (+28,9% sur un an) et l’alimentation, notamment les produits frais (+7,2%).

Tableau 2 : détail de l’indice des prix à la consommation

 

Pour de nombreux analystes, l’inflation ne devrait pas refluer à brève échéance. A moyen terme, toute la question sera de savoir si cette hausse se répercutera sur le reste de l’économie (la hausse des prix des produits manufacturés comme des services reste pour l’heure limitée à 2%). Comment évoluera la consommation et quels effets sur les comportements d’épargne ?

 

Une inflation qui interroge l’organisation du système économique mondialisé

Si cette poussée inflationniste prend appui sur des facteurs conjoncturels (reprise économique post-Covid et la guerre en Ukraine), elle n’en reste pas moins assise sur des facteurs structurels dont les effets délétères commencent à être perçus et interrogent sur les perspectives d’évolution du système socio-économique :

  • un fonctionnement des marchés de l’énergie qui laisse la part belle à la spéculation de court terme (cf. note DEGEST) et interroge sur la capacité des Etats à sécuriser les prix et la production énergétique ;
  • une refonte de la chaine de valeur des entreprises qui a amené à réduire toujours plus les stocks et à produire en flux tendus à partir de marchés mondialisés rendant les prix sensibles aux crises et aux difficultés d’approvisionnement ;
  • si l’interdépendance mondialisée permet de tirer les prix et les normes sociales vers le bas pour les grands donneurs d’ordre (au risque d’une fracture des sociétés et d’une augmentation des inégalités), elle rend sensible des pans entiers de l’économie et de la société à des facteurs sur lesquels plus personne n’a de prise …

 

Des NAO salariales sous tension et à préparer pour les représentants du personnel

C’est dans ce contexte que s’engagent les NAO sur les salaires dans les entreprises : les représentants du personnel sont appelés à négocier dans ce climat de forte incertitude et de perte potentielle de pouvoir d’achat.

Quatre faits saillants sont à noter pour engager la négociation :

  • Des profits records en 2021. Portées par la reprise rapide de l’activité mondiale l’an passé et par les plans de soutien à l’économie, de nombreuses sociétés ont réalisé en 2021 des profits record. Ainsi, les entreprises du CAC 40 ont dégagé un résultat net (part du groupe) de près de 160 Mds€, soit 4 fois plus qu’en 2020. La Banque de France montre que le niveau de trésorerie dans l’industrie et les services marchands est au-dessus de la moyenne de ces 15 dernières années.
  • Une perte de pouvoir d’achat déjà avérée. L’indice du salaire mensuel de base de l’ensemble des salariés a augmenté de +1,7% sur un an à fin décembre 2021 (source : Dares, mars 2022). Sur un an, les salaires en € constant[1] ont donc diminué (comme le montre le décrochage sous zéro des courbes du graphique ci-dessous) de :
    • 1,1% dans l’ensemble des secteurs, dont 1,2% dans la construction et dans l’industrie et de 1% dans le tertiaire ;
    • 0,7% pour les employés, 1,1% pour les ouvriers, 1,2% pour les cadres et 1,3% pour les professions intermédiaires.

 

Tableau 3 : Evolution des salaires mensuels de base (en € constants)

(Source : DARES – Évolution des salaires de base et conditions d’emploi dans le secteur privé Résultats définitifs du 4e trimestre 2021)

A cette perte de pouvoir d’achat « socle minimale » devraient se rajouter les effets de la poussée inflationniste accélérée depuis mars 2022.

  • Une revalorisation du SMIC qui conduit à tasser les salaires. Le SMIC devrait être revalorisé au 1er mai entre +2,4% et +2,6% pour s’établir dans une fourchette comprise entre 1641 € et 1644 € mensuel brut. Sans revalorisation (d’entreprise ou de branche), de nombreux métiers devraient se retrouver en dessous du niveau du SMIC …
 

Tableau 4 : évolution du SMIC en € courant

(Source : les Echos, 31/03/2022)

  • Des dépenses contraintes à un niveau élevé (30%), en raison principalement de la hausse des prix de l’immobilier ces dernières années. Pour les ménages les plus modestes, il est à noter que la hausse des prix de l’alimentation sera également particulièrement pénalisante …

 

Tableau 5: Détail des dépenses pré-engagées dans le revenu des ménages

(Source : INSEE)

Pour conclure, afin d’engager ces négociations salariales dans la meilleure position possible, l’accès à une information économique et financière de qualité sur la situation de votre entreprise et de son secteur d’activité est indispensable. N’hésitez pas à nous consulter pour voir comment nous pouvons vous aider.

[1] Les prix constants sont les prix corrigés de la variation des prix par rapport à une donnée de base ou de référence

DEGEST

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