La nouvelle BDESE et les prérogatives « Environnement » du CSE : apports et limites

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Les nouvelles prérogatives du CSE en matière environnementale interrogent sur les réels apports du décret portant sur la BDESE : quelles sont les avancées pour les CSE en matière de sensibilisation aux problématiques environnementales ? De quels moyens seront dotés les CSE pour exercer cette nouvelle mission et quels sont les risques induits en termes de fonctionnement de l’instance ?

Le contexte

La loi Climat et Résilience (20 juillet 2021) a introduit de nouvelles prérogatives pour les représentants du personnel au CSE. L’urgence climatique est là, le dernier rapport du GIEC (4 avril 2022) dans sa 3ème et dernière partie avance des propositions concrètes pour limiter les impacts du réchauffement climatique. Il reste moins de 10 ans pour agir sur nos modes de vie, nos habitudes de consommation et de production. Les 4 préconisations qui en ressortent devraient nous inciter à :
• Faire le choix de la sobriété énergétique ;
• Privilégier les énergies renouvelables aux énergies fossiles ;
• Doper les financements vers les investissements limitant le réchauffement à +2°C ;
• Intensifier les dispositifs de captation du carbone issu des émissions par les secteurs les plus concernés (Energie, transport, industrie, agriculture).

La volonté du législateur d’étendre les compétences du CSE aux questions environnementales découle de la convention citoyenne pour le climat.
Un décret très attendu, paru le 26 avril 2022, précise les informations qui devront figurer dans la base de données économiques, sociales et désormais environnementales (BDESE).
Ces données s’articulent autour de 3 thèmes : la politique environnementale de l’entreprise, l’économie circulaire et l’émission de gaz à effet de serre.

Les principales dispositions du décret « BDESE » sont une avancée pour certaines entreprises…

Pour les entreprises déjà soumises à l’obligation de publier un rapport annuel sur la responsabilité sociale et environnementale, le décret apporte peu de nouveauté si ce n’est la transposition dans la BDESE des indicateurs spécifiques à l’environnement.

En revanche, pour les autres entreprises (moins de 300 salariés – plus de 300 salariés et non soumises à la publication RSE), les données à renseigner dans la BDESE sont une nouveauté. Toutefois, leur renseignement reste peu contraignant tant les définitions des différents thèmes demeurent très génériques, voire laconiques, à l’image de la première version de la BDES. Par exemple, pour le thème « Economie circulaire », le texte renvoie à la Prévention et gestion des déchets dangereux sans évoquer le recyclage des déchets non dangereux qui font partie intégrante des dispositifs d’économie circulaire. La question de la véracité et du contrôle des informations transmises risque ainsi de devenir un enjeu important ; à défaut la communication de l’entreprise pourrait se transformer en « greenwashing » : mais comment alors vérifier et travailler sur l’information transmise ? Et comment faire le lien entre ces données environnementales et les questions de santé au travail pouvant être induites ?

Pour les élus, cette nouvelle compétence s’inscrit dans les 3 informations-consultations annuelles obligatoires ; pour cette raison le texte intègre un volet environnemental aux formations à destination des élus et syndicalistes. La formation devrait bien être le seul volet permettant aux élus de s’emparer de cette thématique.

…Mais se heurte à 2 limites : certaines BDES ne répondent pas aux attentes des élus qui voient leurs compétences sans cesse s’élargir sans moyens supplémentaires.

L’enquête nationale de 2019 sur la BDES réalisée par le Cercle Maurice Cohen souligne que depuis sa mise en place pour toutes les entreprises (au moins 50 salariés) en juin 2015, la BDES :
• N’est pas systématiquement mise à jour avant chaque consultation du CSE ;
• Dans une entreprise sur deux les prévisions à trois ans n’y figurent pas ;
• Les élus ne sont jamais informés de sa mise à jour pour 59,4% des répondants ;
• Beaucoup d’élus soulignent rencontrer des difficultés d’accès (BDES en format papier dans le bureau du DRH, impossibilité de se connecter en dehors du réseau informatique interne, …) ;
• Réduite à une base de données documentaires et combinée à une navigation fastidieuse, la BDES est souvent inexploitable par les élus.
En plus des difficultés rencontrées par les élus pour accéder à des informations mobilisables dans l’exercice de leurs prérogatives, s’ajoutent les nombreux dysfonctionnements de l’instance.
Depuis la mise en place du CSE dans les entreprises, les représentants du personnel expriment des difficultés dans l’exercice de leur mandat notamment avec des moyens en heures de délégation et nombre d’élus en baisse. Un constat que DEGEST avait déjà anticipé (Note 2018 lien) avant les ordonnances instaurant le CSE et que nous avons rappelé dans l’article (lien) suite à la publication par France Stratégie du rapport 2021 du Comité d’évaluation de la fusion des instances (DP, CE et CHSCT).
Au moment où l’instance va se renouveler à l’occasion du prochain cycle électoral, les élus au CSE vont devoir s’approprier les problématiques environnementales qui concernent leur entreprise alors que la formation économique et sociale date du début de mandat et que certains élus ont épuisé leurs droits. Pour ces raisons, nous estimons que le calendrier n’est pas pertinent.

Conclusion

Dans le cadre de nos missions d’assistance aux IRP, les représentants du personnel nous ont souvent fait part de difficultés d’accès aux informations de la BDES mais aussi à la surcharge de travail induite par la fusion des instances.
Si l’élargissement aux questions environnementales des prérogatives du CSE peut être intéressante, elle se fera sans moyens supplémentaires tant pour contrôler qu’analyser les données transmises ; ce qui fait craindre une charge accrue dans l’activité de représentant du personnel. Seuls les CSE, pour lesquels un accord de fonctionnement plus favorables, et dotés de moyens supplémentaires, pourront exercer pleinement leur mandat désormais enrichi de la nouvelle mission environnementale.
L’équipe DEGEST peut vous accompagner dans cette nouvelle prérogative et étudier avec vous la mise en place d’une formation spécifique « environnement ». C’est aussi l’occasion de dresser un bilan de votre mandat au CSE et de préparer les prochaines échéances électorales en renforçant vos moyens à travers un nouvel accord de fonctionnement de l’instance.

DEGEST

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